Ce qu’il s’est réellement passé aux Rencontres Régionales de l’Heureux Cyclage

Nous prîmes le train pour Nancy un vendredi soir froid et pluvieux, mais surtout pluvieux. A cet instant, nous ignorons encore que tout le Grand Est se fait pleurer dessus et que la pantalon de pluie est en fait l’invention la plus ingénieuse de l’histoire contemporaine devant le 2) lave-linge, 3) la jante double-paroi, 4) la plastifieuse, 5) le karaoké (si, si, vous verrez plus tard). Fin de l’utilisation du passé simple au profit du présent de l’indicatif pour davantage d’adrénaline (technique n°5 de la Nouvelle Méthode de Nouvelle Communication Néo-managériale).

Une fois arrivés à la gare, ma foi fort agréable à arpenter, nous nous dirigeons vers l’atelier Dynamo qui nous accueille pour le week-end. Il pleut toujours. Pour la première fois de mon existence, je traverse la Place Stanislas, non sans un certain émoi. Mes camarades de voyage Claudine et Jayson* et moi-même semblons tellement à l’aise qu’un couple de jeunes dynamiques actifs  nous demandent du feu et s’exclament “mais que les gens sont gentils à Nancy!”. Voilà le début d’un séjour prometteur.

Quelques coups de pédales plus tard, nous voilà dans l’atelier et P***** ILS EN ONT DE LA PLACE ! On compte environ 7 pièces, à quoi s’ajoutent une cave, deux remises pour stockage et UNE DOUCHE. Le temps que la dizaine de Bretz’Selle que nous étions se remettent de ce choc, une marmite de pâtes au pesto atterrit sur la petite table, se fait dévaliser et le temps de boire un thé, tout le monde se met à bailler. Les ateliers commençant à 9h le lendemain, nous décidons sagement d’aller occuper les lits de nos hôtes lorrains, soumis à une seule et même constante : la pluie.

Samedi, 9h : les choses sérieuses commencent. Tour de présentation de chaque atelier et visualisation du réseau Grand Est sur une carte des Etats-Unis d’Alsace : nous sommes 7 ateliers** à s’être déplacés à Nancy et autant vous dire que le café coule à flots. Nous nous séparons ensuite en deux groupes de travail pour réfléchir 1) aux actions de coopération qui pourraient être mises en place à l’échelle du Grand Est 2) aux questions de gouvernance/communication des ateliers. Au moment de la restitution des groupes de travail, on s’aperçoit que les deux thématiques se rejoignent finalement beaucoup et que l’enjeu est le même : que peut-on faire ensemble pour devenir une véritable masse critique de l’Est ? Outre des propositions de partage de matériel, de mise en place d’un kit essaimage à l’échelle de la région, de commandes groupées de pièces, … la question des festivités émerge comme une nécessité rassembleuse (on appelle ça la bière), un pôle régionale Binouze Biker/Alley Cat se constitue et une décision conclu cette matinée d’éreintant labeur : les prochaines Rencontres Régionales auront lieu à l’atelier de Bure au mois de mai et seront l’occasion d’un festival du Do-It-Yourself afin d’aider les copains de Bure à aménager leurs locaux fraîchement acquis.

12h : toujours la pluie, c’est l’heure du repas et je suis bienheureuse de constater que la Lorraine aussi est un autel à hoummous. Une fois nos mousses au chocolat terminées***, nous nous scindons à nouveau en plusieurs groupes : 1) réflexion sur la mixité choisie 2) atelier gants blancs à Dynamo 3) discussion autour du montage d’un atelier vélo. Je choisis cette dernière option et c’est ainsi que commence une balade pluvieuse jusqu’à l’atelier de Maxéville (une sorte de Neudorf de Nancy), le p’tit dernier de la famille. Nous visitons l’atelier, discutons avec les bénévoles, j’essaye de préparer mon déguisement pour le soir (des catadioptres-poings américains) et nous repartons pour la deuxième partie de la visite : les caaaaves de Maxéville qui servent d’espace de stockage aux deux ateliers nancéens. C’est à ce moment qu’intervient le second choc du week end pour l’atelier de 30m2 que nous sommes. Devant nos yeux ébahis, les grandes portes des anciennes caves de vin laissent découvrir 9 500m2 de murs humides, de loooongues travées, d’immenses cuves en carrelage et de couloirs entremêlés. C’est dans une partie du bâtiment que les deux ateliers entreposent un paquet de vélos et de pièces détachées et dans un si grand espace, le bordel n’a finalement pas l’air si monstrueux. Tout ça me rappelle fortement la Fabrique et ça ferait sûrement un sacré Escape Game !

18h : retour à Dynamo pour préparer LA soirée. Tout le monde s’active autour des assiettes, des paquets de chips, des casseroles et des cakes faits maison pour prendre des forces avant le début des hostilités. Traduisez : la compétition de démontage de vélos par équipe avec contrainte. Les équipes se constituent et pour ma part, je rejoins la force tranquille d’Hugo de Besançon et Michel de Reims. Le niveau sonore commence sérieusement à monter, les outils à s’éparpiller et après une heure et demie à démonter avec un poignet attaché à celui de mon camarade, nous acceptons la victoire de l’équipe de Sacha dont la force non tranquille a su faire ses preuves. Je retourne voir ce qu’il reste du comté 18 mois d’affinage qu’ont ramené Hugo et Claire de VéloCampus et si je n’en trouve plus grand chose, quelque chose d’intéressant en revanche se trame à côté. Trois cyclowatts sont installés, bordés par des micros, annonçant le pic de la soirée – le Liberté-Egalité-Karaoké animé par le plus fou, le plus fort, le plus beau de tous, Jean-David Harmony. Trois heures de cris, de photos dédicacées de Céline Dion,  de refrains d’Emile et Images et de la version suédoise de “Ce rêve bleu” plus tard, Jean-David annonce le dernier morceau une fois, deux fois et finalement, on le rappelle cinq fois tant notre soif de sa coupe mulet est insatiable. Après tant d’efforts et d’émotions, quelques uns d’entre nous préparent une tournée générale de spaetzles au munster et là encore, un beau moment d’humanité : c’est autour de 14 assiettes fumantes, vidées en 3 minutes 15 par 14 louches personnages déguisés en choucroute ou aux couleurs des vélocross des années 80, que je fête mon troisième anniversaire d’adhésion à Bretz’Selle. J’en suis si chamboulée que j’oublie d’aller me resservir. Une fois la vaisselle terminée, nous rentrons sagement au club de kayak qui nous héberge en redoutant le réveil du lendemain. Je monte avec soulagement à l’étage, des coussins moelleux virevoltant dans mon esprit, avant de m’apercevoir qu’un ronflement surpuissant provient du dortoir où je vais dormir. J’ai un peu envie de pleurer mais tant pis, j’écouterai la pluie.

Dimanche, 9h30 : Jean-David Harmony soit loué, le café coule toujours à flots et cela rassure mon esprit embrumé. La vue de tous mes camarades de vélo et l’ambiance dimanche-poulet rôti en famille me réchauffent elles aussi le cœur. Malgré l’âpreté du réveil, je décide de me joindre au groupe de travail sur les financements et à la fin de la matinée, je me dis que c’est finalement le meilleur moyen pour avoir une approche globale et concise du fonctionnement et de la pérennité des ateliers.

L’après-midi, quant à elle, est consacrée aux questions du recyclage et du réemploi et très honnêtement, j’ai arrêté ma prise de note à ce moment là, le café ne faisant plus effet. J’en ai retenu l’événement de Dynamo “le Père Noël aime les ordures” et la décision de consacrer une page du Wiklou au recyclage artistique afin de centraliser toutes les bonnes idées et les bonnes techniques en la matière.

17h30 : c’est le triste moment des adieux et nous repartons plein de bisous dans le cœur, de Céline Dion dans les oreilles et de p’tits vélos dans la tête en nous promettant de nous revoir vite. Dehors, il pleut encore et toujours mais ces Rencontres m’auront appris que la pluie n’est pas une fatalité pour l’esprit et qu’ensemble, on va non seulement plus loin mais on est aussi moins tristes l’hiver.

Merci mille fois et encore mille fois à Dynamo pour l’accueil hautement chaleureux, l’exquise cuisine et tout le reste que je ne citerai pas parce que cet article est déjà bien trop long ! Vivement les prochaines Rencontres Régionales et le monde vélorutionnaire des bisous, de l’humour de merde et des roues libres ! Et puis l’été, aussi.

 

“Nous partîmes cinq cents ; mais par un prompt renfort,

Nous nous vîmes trois mille en arrivant au port,

Tant, à nous voir marcher avec un tel visage,

Les plus épouvantés reprenaient de courage !”

*Les prénoms ont été modifiés par souci d’anonymat

** Bure, Metz, Strasbourg, Reims x2, Saint-Dié, Besançon

*** Retrouvez les cuisinier.ère.s de Dynamo et leurs recettes dans la dernière édition du guide Michelin

grand est nov 17